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1Monsieur de Gordes, j’ay receu les lettres que vous m’avez escriptes du [date laissée en blanc] du présent,
2et veu par la teneur d’icelles le bon ordre que vous avez donné à Vallance. Je
3me promectz qu’avec le nombre d’hommes que vous y avez mys et la prudence du
4sieur de La Thivolière, qu’il n’y adviendra aulcun inconvényent ; et ce que je vous escripvis
5dernyèrement du besoing qu’il y avoit que vous y fissiez ung passaige n’estoit
6pas pour vous persuader d’y demeurer, ains pour y donner le mesme ordre que
7vous avez faict. Quant aux six compagnyes, je suis bien d’avys que, sans attendre
8la vollunté du roy, vous les faictes lever, car, comme vous dictes, sa majesté ne
9trouvera jamais maulvays ce que l’on fera pour son service, et ne seroit pas temps
10de les lever quand la nécessité s’en offriroit, qui est évydente, car maintenant nous
11pouvons croire que nous sommes à la guerre ; et tant plus nous allons en avant, tant
12plus elle s’eschauffe de deça. D’aylleurs sa majesté m’a escript qu’ayant envoié le sieur
13du Vigen à La Rochelle pour négotier avec les Rochellois, ilz l’ont blessé à la mort
14de cinq grandz coups d’espée, et tué trois gentilzhommes de sa compagnye, estant
15sadite majesté en crainte qu’ilz veullent s’ayder des estrangiers ; par ainsi le plus tost sera
16le meylleur que vous faictes lever lesdites compagnyes, car, puisque cella est, ce païs et
17le Daulphiné seront en dangier d’avoir avec le temps tout le fardeau de ceste guerre
18sur le dos. Quant au faict de Montbrun, puisqu’il vous use de tant de
19longueur, je m’en donne une fort mauvaise augure et ay peur qu’à la fin il vous
20eschappera. Il ne s’y fault fyer que de bonne façon et prenez bien garde que sur
21ces entrefaictes, ilz ne facent quelques assemblées, car l’on m’a adverty que vers
22Aurenges il y a quelques cappitaines de la nouvelle oppinion, lesquelz toutesfois
23ne bousgent, mais il y a encore assez de temps pour ce faire. Au reste, quant
24aux commissions que j’avois depeschées pour lever des compagnyes en votredit gouvernement, je vous advise qu’il n’y en avoit qu’une addressante au sieur de
25Rochefort ; et sy avec cella je l’avoys acompaigné d’une lettre que je vous escripvois
26pour vous prier de luy bailler lieu pour la dresser. Mays depuis en ça, il
27n’a eu le moyen de la dresser et m’a renvoyé la commission et les lettres.
28[v] Je serois bien marry, en cela et en toute autre chose qui déppendera
29de votre gouvernement, de permectre qu’il s’y feist rien du monde sans
30votre sceu ; et si je vous respondis que monsieur de Suze m’avoit pryé pour ledit sieur de
31Rochefort, et que je ne l’avois pas recherché d’accepter ladite compagnye. Voilla
32tout ce que je vous puis escripre, et vous prye pour la fin continuer de me
33faire part de voz nouvelles, et le feray de semblable de mon costé, d’aussi bon
34cœur que je me recommande à votre bonne grâce, priant Dieu vous donner,
35Monsieur de Gordes, en parfaicte santé, longue et heureuse vye. De Beaucaire,
36ce XXXe novembre 1572.
37Votre plus affectionné parfaict et asseuré amy
38H de Montmorency